Propulsé par les acteurs culturels d’Alès Agglomération
Extrait du Journal Moulin à Paroles • Projet coordonné par le Collège Jean Moulin
Œuvre support : Les Dodos, Le P’tit Cirk
Reporteurs : Timéo Merle, Téo Morreel, Noa Presti, Samuel Pontet, Lynda Guzman, Sheryleen Vendran et Nolan Vivier
Lorsque Charly Sanchez, Alice Barraud, Pablo Escobar, Basile Forrest et Louison Lelarge entrent en scène, on remarque d’abord les instruments de musique. Ils sont aimés, joués, lancés ; on leur marche dessus ; Ils dessinent des formes géométriques dans l’espace. Ils sonorisent des chorégraphies, savantes, joueuses et joyeuses.
La troupe travaille ensemble. Ils se montent les uns sur les autres, se réceptionnent, voltigent, dansent… Ils nous font rire, ils nous font peur, ils nous émeuvent…
C’est un spectacle total d’une richesse étonnante : la multiplicité des pratiques au sol, dans l’air, circassiennes ou musicales, les personnalités qui émergent dans des mises en scène ciselées, le décor, lumineux, simple et changeant. Tout est pensé au millimètre près.
Les élèves ont marché 40 minutes à l’aller et 40 minutes au retour. Aucune plainte. Ils ont adoré ! Et après le spectacle, ils ont pu interviewer les artistes :
Téo : Vous avez mis combien de temps pour réaliser ce spectacle ?
Basile et Pablo : Cela fait trois ans que nous travaillons dessus. Nous avions d’autres spectacles en parallèle. Pendant deux ans, dès que nous avions du temps, nous nous retrouvions pour répéter ensemble, chez des copains, dans des gymnases. La dernière année, nous avons passé tout notre temps sous chapiteau pour l’écrire. La création a duré sept mois.
Alice : Par contre, les figures, les acrobaties, nous nous sommes entraînés avant dans des écoles ou lors de formations.
Samuel : Vous avez commencé à quel âge ?
Alice : Moi, j’ai commencé à 18 ans !
Pablo : Moi, j’ai commencé à 11 ans dans une école de cirque amateur à jongler et à faire de l’acrobatie. À 18 ans, je suis rentré dans une école de cirque préparatoire, puis en école professionnelle.
Nolan : Combien vous avez de guitares ?
Basile : Une soixantaine ! Mais nous en avons d’autres en réserve car quelquefois, on en casse !
Timéo : J’ai une chose à dire : vous êtes trop chauds !
Pablo : On est chauds ? Ça veut dire quoi ? C’est un compliment ? Merci beaucoup !
Samuel : Elles sont où vos écoles préparatoires et comment s’appellent-elles ?
Alice : Il y en a une dizaine en France. Moi, j’en ai fait une qui s’appelle l’école de cirque de Lomme qui est dans le Nord à côté de Lille. C’était une année préparatoire suivie de trois ans de professionnalisation.
Pablo : Ici, tu as le Salto ; c’est aussi une école préparatoire. Ensuite, il y a Balthazar à Montpellier. Sinon, il y en a un peu partout dans toute la France…
Basile : Il y a aussi des lycées et des collèges qui ont des classes aménagées cirque.
Hugo : Le guitariste parlait quelle langue ?
Pablo : Il parlait sa propre langue ! Nous non plus, nous ne l’avons jamais comprise.
Basile : Je crois que lui non plus ne sait pas quelle langue il parle !
Téo : Y a-t-il eu des imprévus pendant le spectacle ?
Pablo : Oui, à la fin quand Louison a fait tomber sa bande par terre.
Basile : Là, ça m’a fait rire, mais sinon, régulièrement, on a des imprévus vraiment pas prévus ! Comme dans ce spectacle, il y a plein d’imprévus prévus, les imprévus ne se voient pas !!!!
Timéo : Vous vous entraînez combien de temps pour réussir à faire les figures sur le portique ?
Basile : C’est ce qui nous a pris le plus de temps. Au démarrage de la création, il n’y avait que moi qui savais faire de la voltige sur ce portique. Au fur et à mesure, les autres circassiens ont dû apprendre. On répète au moins une heure chaque matin les jours de spectacle. Et on s’échauffe avant, on s’étire après. Ce qui fait qu’on travaille presque 2h30 chaque fois.
Adam : C’est quoi la poudre blanche que vous utilisez ?
Basile : C’est de la magnésie. C’est comme à l’escalade ou à la gymnastique. C’est pour ne pas que ça glisse. Ça sèche les mains quand elles transpirent. Les bandes de tissu autour des poignets, c’est aussi pour ça, pour que ça ne glisse pas.
Sacha : Est-ce que vous faites souvent des spectacles ?
Basile : oui, toute l’année.
Pablo : C’est notre métier, on ne fait que ça. On fait entre 60 et 80 spectacles par an.
Alice : On a ce spectacle, mais on en a d’autres aussi. On est beaucoup en tournée et rarement chez nous.
Pablo : …et beaucoup chez l’ostéopathe !
Basile : …ou chez le kiné !
Pablo : …ou chez le masseur, ou au sauna !
Noa : Est-ce que ça a été compliqué pour vous de vous faire confiance au départ ?
Alice : Non, dans les duos de voltigeurs, porteurs, tu te choisis. C’est déjà un acte de confiance. Et ensuite, tu travailles au quotidien. Nous, on a beaucoup travaillé. Il nous est arrivé plein de choses comme des accidents, des chutes… On a appris à s’apprivoiser, à voir comment on réagissait ensemble. La confiance, c’est quelque chose qui se travaille en permanence et on continue encore aujourd’hui.
Timéo : Pourquoi le spectacle s’appelle Dodo ?
Pablo : Il ne s’appelle pas Dodo mais Les Dodos. Vous connaissez l’animal ?
Samuel : C’est un grand oiseau qui ne sait pas voler.
Basile : C’est aussi le 1er animal dont l’homme a été témoin de la disparition. Il ne vivait que sur une seule île à côté de la Réunion, l’île Maurice. Il résonnait avec nous. Dans notre imaginaire, il essayait toujours de s’envoler et il n’y arrivait jamais ! On le voit dans L’Âge de Glace 1.
Téo : Est-ce qu’en dehors de vos entraînements pour le spectacle, vous faites de la musculation ?
Basile : Quand cela fait longtemps qu’on n’a plus joué en spectacle, on est obligés de se remettre en forme, sinon on peut se blesser. On n’est plus tout jeune ! Pendant une semaine, on s’entraîne tous les jours. Mais on n’est pas trop fans de musculation. On préfère travailler tout seul, on fait du gainage, des abdos, des équilibres sur les mains… On ne va pas en salle.
Pablo : On transporte des gros cailloux dans ma maison !
Samuel : Vous mettez combien de temps pour plier le chapiteau ?
Pablo : Le montage, c’est à peu près 9 heures, le démontage, plus ou moins 6-7 heures.
Basile : Souvent, on arrive le midi, on prépare le montage du chapiteau, les deux mâts noirs, les câbles et le lendemain, on monte tout l’intérieur. Mais on demande dix personnes en plus pour nous aider, sinon, on mettrait trop de temps et on se fatiguerait trop. Nous arriverions au spectacle « cassés ».
M. Villard : Comment se passe la création du spectacle ? C’est une réalisation collective, c’est par rapport à vos capacités ou au contraire, vous poussez vos capacités pour arriver à faire ce que vous voulez ?
Alice : C’est un peu tout ça. À la base, on a voulu faire un spectacle collectif où on voulait tous tout faire. Charly par exemple, n’avait jamais fait de cirque. Il était guitariste. On a tous travaillé, on s’est beaucoup entraînés pour apprendre la technique des autres. C’est pour ça que la création du spectacle a pris plusieurs années. Basile nous a tous appris le cadre coréen [le portique] ; Charly nous a tous fait travailler la musique même si Basile était déjà violoniste. On a échangé nos pratiques et on s’est poussés plus loin. Quand on répète le matin, on continue à travailler de nouvelles figures.
M. Villard : Le spectacle évolue encore ?
Alice et Basile : Il est resté le même mais il a beaucoup évolué.
Alice : On le tourne depuis 2017, on en est à la 270ème date, donc oui, il a beaucoup changé. Parfois, il y a des imprévus, des accidents et comme ils sont géniaux, on les garde. On aime bien jouer avec ce qui arrive. C’est un spectacle qu’on a créé quand on avait 20 ans. On sent que dix ans plus tard, on ne récupère plus pareil. On continue à travailler mais ce n’est plus les mêmes corps.
Mme Folcher : Comment vous faites pour l’organisation puisque vous avez plusieurs spectacles en même temps ?
Pablo : C’est difficile.
Basile : C’est la partie compliquée des tourneurs (ce sont des personnes embauchées pour faire tourner les spectacles). Ils doivent trouver des dates en France et en Europe, un peu cohérentes géographiquement, par conscience écologique et pour que ça coûte moins cher. Ce sont eux qui s’arrangent avec les plannings de chacun, les disponibilités de tout le monde.
Mme Folcher : Combien de spectacles vous avez chacun ?
Basile : Au moins deux spectacles, voire trois selon les périodes.
Noa : Pourquoi avoir utilisé des guitares dans le spectacle ?
Charly : Moi je suis guitariste au départ. Je ne faisais pas de cirque. Ils voulaient toujours balancer ma guitare ! Je leur ai dis qu’on le ferait avec une autre guitare. On en a trouvé une, puis une autre et l’idée nous est venue de jouer avec plein de guitares ! On en a trouvé 100 ! À partir de là, on s’est amusés avec !
Adam : Pendant le spectacle, quelle langue tu utilisais ?
Charly : Tu penses que c’est quelle langue ?
Adam : Je ne sais pas, espagnol ?
Charly : C’est un mélange de plein de mots. Parfois, il y a des mots qui existent, d’autres fois non. Je suis tombé sur une vidéo d’un turc éleveur de canaris. Il expliquait le langage des oiseaux. Tchoc tchoc enia, c’est vraiment le langage canari… traduit en turc !
Basile : Ça, c’est une histoire vraie !
Alice : C’est ça la création ! Il y a des choses qui arrivent de nulle part !
Sacha : Est-ce que vous vous étirez beaucoup avant les spectacles ?
Basile : Ça dépend… Il y en a qui préfèrent fumer des cigarettes et boire des bières. On n’est pas tous égaux !
Mme Folcher à Charly : Qu’est-ce qui vous a poussé à apprendre le cirque ?
Charly : C’est l’occasion. Mais on s’est beaucoup entraînés. Au départ, je n’étais pas assez souple. Je ne pouvais aller que jusque-là [il touche ses genoux], maintenant, je peux aller jusque-là [il touche ses pieds] !
Mme Lefèvre Amalvy : Merci infiniment d’avoir pris ce temps-là. Merci d’avoir accepté les questions des reporteurs !
Timéo, Téo, Noa, Samuel, Lynda, Sheryleen, Nolan, Sacha, Hugo, Adam, M. Villard, Mme Folcher, Mme Chabanis… remercient les artistes.